Objectifs
En travaillant sur les données Sniiram 2013 puis 2014, nous avons observé plusieurs incohérences entre les données portant sur les nombres d’actes codés, les honoraires enregistrés et le nombre des praticiens codeurs.
Ceci compliquait notablement l’évaluation de l’impact de nouvelles propositions tarifaires et pouvait donner lieu à des polémiques susceptible de freiner les négociations conventionnelles.
Pour essayer de préciser les choses, nous avons rassemblé dans ce rapport les anomalies observées et tenté de trouver les moyens d’y pallier. Nous avons étudié successivement :
- les effectifs de praticiens codeurs et la répartition des praticiens et des actes entre les secteurs
- la comparaison entre le nombre de médecins codeurs sur les bases Sniiram et effectifs CNOM
- la proportion entre S1 et S2
- les volumes d’honoraires
- Les tarifs calculés versus tarifs opposables
- La reconstruction des dépenses NGAP
Les effectifs de médecins codeurs
Notre référence était l’Atlas du CNOM de janvier 2015. Il donnait les effectifs de praticiens par spécialité, en précisant la part des libéraux, des exercices mixtes et des salariés. Il ne précisait pas le secteur conventionnel des praticiens ni la proportion de signataires du Contrat d’accès aux soins (CAS) instauré en octobre 2012 par l’avenant n°8 à la Convention médicale.
Dans la base Sniiram, nous avons relevé pour l’année 2014 les effectifs de praticiens ayant codé les différents actes et majorations inscrits à la Ngap, à l’exclusion des actes cotés en K. La base donnait des précisions sur le secteur d’exercice et la signature ou non du CAS.
Effectifs codeurs versus effectifs CNOM
Grâce à un tableau croisé dynamique, nous avons relevé le nombre de praticiens codeurs de chaque code de consultation à la Ngap (Sniiram 2014). En face, nous avons mis les effectifs CNOM 2015 pour les « libéraux et mixtes », puis pour la totalité des praticiens (salariés inclus).
- En rouge : l’effectif le plus élevé de chaque ligne.
- En fond jaune : les effectifs largement supérieurs à l’effectif CNOM des « libéraux et mixtes ».
- En fond vert, dans la colonne CNOM « libéraux et salariés », les effectifs se rapprochant de l’effectif Sniiram.
On voit que pour beaucoup de spécialités, les divergences étaient majeures, souvent de plusieurs multiples, par rapport à l’effectif CNOM. Par exemple, on notait 150 000 omnipraticiens et 7500 dermatologues…
Il est donc évident que les mêmes praticiens étaient enregistrés plusieurs fois dans les bases Sniiram, peut être en fonction de leurs différents lieux d’exercice ou selon qu’ils télétransmettaient ou émettaient une feuille de soins. Il est également possible que les données des différentes caisses de leurs patients ne fussent pas ou mal consolidées.
Conséquence : les rapports entre nombres d’actes et nombre de praticiens ne sont pas interprétables. Même chose pour les honoraires par praticien.
Répartitions entre Secteur 1 et 2
Les honoraires ont été notés pour tous les actes Ngap (hors K), tandis que les nombres d’actes et les praticiens codeurs n’ont été décomptés que sur les codes principaux de consultation. Bases Sniiram 2014.
Chez les spécialistes, la part du Secteur 1 était différente selon qu’il s’agît des honoraires, du nombre d’actes ou des praticiens codeurs. L’addition des honoraires de majoration aux honoraires de consultation aurait dû augmenter la part du Secteur 1 en termes d’honoraires.
Or, on a observé le contraire ! Cela laisse à penser que des compléments d’honoraires du Secteur 2 ont été enregistrés dans la base de données.
Volumes d’honoraires
Tarifs Sniiram moyens versus tarifs Ngap
Ratios sur l’ensemble des donnéées Sniiram 2014
Les tarifs recalculés d’après les données Sniiram étaient très nettement majorés pour les codes principaux de consultation : C à 24 €, CS à 33 €, C2 à 53 €.
Par contre, il y avait peu de différence, voire une légère différence négative sur les valeurs des majorations et forfaits.
Cela suggère que beaucoup de majorations ont été intégrées dans les honoraires des codes principaux sans être ventilées sous les codes spécifiques, ni en nombre, ni en honoraires.
Conséquences : sous estimation du nombre de majorations spécifiques et flou autour des honoraires de consultation.
Reconstruction budgétaire
Reconstitution budgétaire à partir du nombre de codages et de la valeur réglementaire des codes. Données Sniiram 2014.
On notait une différence de 1,2 milliards d’euros entre le budget recalculé et le budget enregistré sur la base de données Sniiram, soit 11,8 % du budget Sniiram. Les principales différences se situaient au niveau de la CS et du CNPsy.
Les budgets des majorations étaient minorés dans la base Sniiram, mais cela ne suffisait pas à rééquilibrer les différences observées sous les codes de consultation.
Certes, quelques variantes de codes, ainsi que les associations à des codes CCAM n’ont pas été prises en compte dans ce modèle. Mais ceci ne pouvait expliquer une différence aussi importante. La principale cause était probablement, comme nous l’avons vu plus haut, l’intégration des honoraires associés dans les codes principaux de consultation
Les honoraires enregistrés dans la base Sniiram ne peuvent donc pas servir de référence de comparaison pour l’estimation d’un nouveau modèle de tarification. Seule une reconstruction budgétaire à partir des nombres de consultation et des tarifs réglementaires peut permettre des comparaisons pertinentes.
Exemples de distribution des honoraires pour C, CS et C2
Nous avons alors demandé à l’ISPL de relever la distribution des honoraires pour certains code en médecine physique et de réadaptation (année 2014). Voici les graphiques :
Pour la C
En Secteur 1, deux pics étaient observés :
- un pic 42-43 € : codage C2 ???
- un pic 69-70 € : codage densimétrie ?
En Secteur 2, on ne retrouvait pas ces 2 pics, mais un pic principal à 54-55 € : intégration du dépassement d’honoraires ?
Pour la CS
En Secteur 1, un pic principal à 23-24 €. Pas d’explication évidente.
En Secteur 2, distribution anarchique des honoraires : mélange avec les dépassements ?
Pour la C2
En Secteur 1, pic à 46-47 € : c’est cohérent avec la cotation.
En Secteur 2 : distribution totalement incohérente…
Au total, il est confirmé que les honoraires de consultation sont mal ventilés, mêlant des codes associés et aussi des dépassements d’honoraires pour le Secteur 2.
Pour limiter l’imprécision des estimations, il faudra donc se limiter aux actes codés en Secteur 1, le CAS Secteur 2 ne représentant qu’une part marginale de 5% des honoraires.
Conclusion
Ce travail a révélé plusieurs discordances :
- Entre nombre de médecins codeurs et effectifs Cnom. Les effectifs de praticiens codeurs ne sont pas utilisables en valeur absolue.
- Dans la répartition entre Secteur 1 et Secteur 2, surtout pour les spécialistes monodisciplinaires. Le Secteur 1 représente 46 % des honoraires, 55 % des consultations et 51 % des praticiens codeurs. Alors que le taux d’honoraires Secteur 1 devrait être égal ou supérieur au taux de consultations, en raison des majorations, il apparaît inférieur. Cela laisse évoquer une intégration d’une partie des compléments d’honoraires dans les bases Sniiram.
- Sur les valeurs recalculées des lettres clés de consultation : à 24 €, CS à 33 €, C2 à 53 €, d’après l’ensemble des données Sniiram 2014. Les majorations sont moins affectées.
- Sur le budget recalculé de la Ngap, versus les honoraires Ngap enregistrés, pour l’ensemble de l’activité 2014. On observe une différence de 1,2 milliards d’euros, soit 11,8 % du budget Ngap. La non prise en compte de quelques majorations spécifiques dans le recalcul budgétaire ne suffit à expliquer une telle différence.
Enfin, la distribution des valeurs des lettres-clés C, CS et C2 sur la MPR, prise pour exemple, a montré :
- Des pics anormaux en Secteur 1 pour la C, faisant suspecter l’intégration de majorations ou d’actes associés sous cette lettre-clé.
- Une distribution anarchique pour les trois lettres clés en Secteur 2, faisant suspecter l’intégration des compléments d’honoraires, au moins en partie.
Si l’on veut limiter les biais dans l’estimation d’une nouvelle formule de valorisation de l’activité clinique, il faudra limiter les constructions et comparaisons au Secteur 1 et travailler exclusivement à partir du nombre de codes relevés dans la base Sniiram.